Fifty Shades of Soul

Walnet Groove, South Australia, 20h44 - Confortablement installée dans son canapé usé par le temps, Eugenie Greenberg regarda avec attention les dernières minutes de son feuilleton préféré. Elle se prit alors à rêver d'amour, d'aventure et d'une vie bien remplie. Ce qu'elle n'eu en réalité, jamais. Nous connaissons tous une Eugenie Greenberg, cette personne qu'on adore détester, qui connaît tout sur tout et qui s'octroie le droit de fouiller dans la vie de ses voisins. Madame Greenberg avait cette fâcheuse manie de donner son avis sur tout et de conseiller, souvent à tord, les rares amies qui lui restaient fidèles. Elle mettait d'ailleurs un point d'honneur à conserver tout ce qui concernait la vie privée des autres dans un petit carnet noir. Sa famille en personne en avait fait les frais. Son mari était décédé il y a des années, on racontait qu'il l'avait fait exprès, rendu fou par les commérages de sa femme. Sa fille ne lui adressait plus la parole et même ses voisines les plus proches la fuyait. Mais voilà, Eugenie Greenberg restait persuadée que sa tendance au commérage rendait service à son quartier. Et elle s'en félicitait. La seconde particularité de cette chère Eugenie était le rituel qu'elle opérait chaque soir, depuis son emménagement dans cette rue, quatorze ans auparavant. A vingt-deux heures précise, elle éteignait son vieux poste de télévision, allumait la lumière de son perron et montait dans sa chambre qu'elle prenait soin de fermer a double tour. Puis, elle se dirigeait vers sa table de nuit où trônait fièrement un automatique. Vous avez bien entendu. Mais qui dort avec une arme à feu sur sa commode me direz-vous ? Et bien dans Walnet Groove, tout le monde. Car dans notre charmant quartier tout le monde possède un secret, un vice ou une addiction. Les ménagères sont des as du tir, les chefs d'entreprise promène un couteau dans leurs attachés-case et les adolescent se laissent aller à tous les pêchés imaginables. Cependant, en apparence, tout le monde se montre prévenant, jamais un mot plus haut que l'autre et les sourires sont sur tous les visages. En cette soirée d'hiver, tout était particulièrement calme. Fort heureusement, ne dit-on pas que le calme présage très souvent d'une affreuse tempête ...